La vie est une compil. Chaque jour est une playlist. L'amour est un remix...

samedi 25 septembre 2010

U2 - Interpol 0 (Stade Roi Baudouin 23.09.10)


Ce n'est pas très fair play de ma part... Le match était joué d'avance... Il faut reconnaître une certaine bravoure au groupe de Paul Banks pour avoir ôsé affronter pareil monstre... Le monstre, ici, ce n'est pas U2 mais bien  cette immense scène en forme de golgoth, digne du meilleur épisode de Goldorak.
Un géant d'acier qui n'a fait qu'une bouchée d'Interpol.
Sur disque, le parallèle est inévitable : pour leur quatrième album, les américains semblent définitivement à court de sang neuf et connaissent déjà leurs premiers remaniements (désertion du bassiste dès la sortie du disque...). On se rappellera que le quatrième album de U2 s'appelle "The Unforgettable Fire"; qu'il marque la rencontre  des irlandais avec Brian Eno et que ce moment appartient à l'histoire du rock.
On constate aussi, non sans une émotion palpable, que le quatuor de Dublin est resté soudé après 30 années d'existence.
C'est David Bowie qui joue les Monsieur Loyal de prestige. Le fabuleux décompte de "Space Oddity" servant d'introduction à tous les concerts de la tournée européenne.
Je suis assis derrière la scène. Enfin, pas vraiment... Le concept des 360° permet à tous de profiter pleinement du concert et surtout, aux promoteurs, de rentabiliser à fond l'espace disponible dans un stade; quand d'habitude, un quart des gradins est indisponible... Habile coup de marketing déjà éprouvé par Prince ou...Céline Dion.
Qu'on le déplore ou non;  ce sont ces paradoxes qui font que le rock'n'roll existe.

"What time is it in the World ?"
C'est la question qui semble préoccuper le groupe depuis l'incroyable Zoo Tv Tour (la dernière tournée à laquelle j'ai assisté, 17 ans déjà !). Une thématique d'universalité au dessus des prises de positions politiques qui ont souvent plombé le discours de U2 : groupe engagé par excellence. Les dangers de l'hyper-communication pointés du doigt à la sortie d' "Achtung Baby" connaissent aujourd'hui les pires dérives. Rattrapé par l'avènement des réseaux sociaux (Facebook et consorts...), Bono semble un peu dépassé... "Quelle heure est-il dans le monde ?". Cette fois, Bono n'essayera pas de nous bluffer en envoyant de belles phrases. Il n'a pas la réponse, ne tire pas de bilan. Il ne lui reste que la musique et c'est précisément ce qui fait de cette tournée un must.

Le choix du répertoire est impeccable. En deux jours, U2 revisite toute son histoire. Ceux qui ont eu la chance d'assister aux deux soirées, ont eu droit à des playlists sensiblement différentes. Plutôt couillu pour un groupe de cette envergure.
Le décorum a beau être démesuré, l'homme contrôle la machine. Tous les effets spéciaux du monde paraissent bien vains face à un riff de The Edge. L'homme est humbe (il sait ce qu'il doit au tandem Eno/Lanois) et fort à la fois (c'est lui la clé de voûte du son U2).
Bono se la joue volontiers diva. Le showman a pris le pas sur le chanteur engagé. Franchement, ce n'est pas plus mal. Il chante magnifiquement bien (le son est parfait). Sur un "Miss Sarajevo" d'anthologie, il reprend à son compte la partition de Pavarrotti dans un époustouflant crescendo. J'en ai encore la chair de poule... J'espère que Florent Pagny aura la bonne idée d'assister à un concert de la tournée...Ca devrait lui passer l'envie de pousser ses vocalises laxatifs...
J'ai beaucoup aimé le moment où Bono, après avoir revêtu une veste lumineuse sortie tout droit de la garde robe de Michael Jackson, la restitue à son propriétaire, en la laissant s'envoler vers le firmament.
Un firmament capricieux. Plus que clément le premier soir. Impitoyable de tonnerre et de pluie, le second.
Pas à un paradoxe près, Bono se fourvoie quelque peu en demandant au public de faire briller les étoiles au moyen de leur GSM. Bono l'humaniste a-t-il oublié combien de petits africains meurent tous les jours pour un morceau de coltan ?
Évidemment, on lui pardonne. La communion est bel et bien là. Dans ce stade qui a connu des heures sombres, tout le monde vient de vivre un moment de pur bonheur.
"Quelle heure est-il dans le monde ?"
L'heure de revenir à la réalité... "Get on your Boots !"

Bonus : les 11 premièrtes minutes du concert au Stade Roi Baudouin

dimanche 5 septembre 2010

Brandon Flowers - Phillip Selway : la battle

Sur la pochette de son disque, Brandon Flowers se prend la tête. Il a l'air de penser "P... mais qu'est-ce que j'ai fait ? Il est tout foireux mon premier album".
Mais non Brandon, rassure-toi...Il n'est pas si mauvais que ça ton premier disque. Disons que, comme tout album solo du chanteur d'un groupe en vogue qui se respecte, on a souvent du mal avec le résultat. Dans les interviews, la démarche parait pourtant limpide. Tous nous ont fait le coup du "Je vais enfin pouvoir faire ce que j'ai toujours voulu. Je ne serai plus limité par les contraintes imposées par le groupe..." ce genre de certitudes. Et au final... Et bien Dave Gahan continue à faire du Depeche Mode; Gaetan Roussel du Tarmac et Thom Yorke (on y reviendra) du Radiohead... Et nous, on est un peu embarrassé pour eux.
Brandon Flowers sort donc son premier album des Killers...sans les Killers.
Et très vite, on se rend compte à quel point le côté "sans filet" de l'entreprise peut s'avérer périlleux. En effet, sur un album des Killers au grand complet, on aurait jamais entendu cette infâme singerie country qu'est "The Clock Was Tickin'"...  Pas à l'abri de quelques fautes de goût, "Flamingo" contient aussi sont lot de bons morceaux (mention speciale à la splendide ballade  " Playing With Fire"). "Crossfire", single éclaireur, confirme le talent de songwriter du sieur Flowers. Un titre comme "Jilted Lovers And Broken Hearts" prouve même qu'il peut se passer des Killers...mais pas trop souvent, pour son ego. A l'écoute de ce disque à la fois vain et émouvant, on a juste en vie de dire à Brandon : "Reviens, gamin, c'était pour rire!"
Comme promis, reparlons de Radiohead. Plus précisément de son batteur : Phillip Selway. Ce dernier possède un avantage certain sur le chanteur des Killers. Phillip Selway est batteur. Toute personne ayant fait partie d'un groupe de rock sait qu'en matière d'ego, il y a un monde de différence entre un chanteur et le batteur d'un groupe. Une des caractéristiques commune à tout bon batteur étant l'humilité. En insufflant le rythme à chaque chanson, le batteur est l'élément rassurant. Il n'a rien à prouver.
La bonne surprise chez Philip Selway, c'est qu'il chante très bien. On se surprend même à penser qu'il ferait bien, de temps en temps, de relayer la voix geignarde de Thom Yorke qui, parfois, rends pénible l'écoute d'un album de Radiohead sur toute sa longueur... Épaulé par Lisa Germano et des musiciens de Wilco, Selway livre un disque dépouillé (peu de batterie) et révèle une écriture sensible. Rares sont les disques solo ayant une réelle valeur ajoutée. "Familial" en est un. Ca mérite d'être souligné.

Hurts - Happiness

Tout fan des Pet Shop Boys qui se respecte doit éprouver une bien étrange sensation en contemplant la pochette du premier album de Hurts, duo d'electro-pop, originaire de Manchester.
Je me suis effectivement demandé par quel subterfuge Neil Tennant et Chris Lowe posaient, en 2010, avec l'allure de parfaits jouvenceaux... Certes, ils ont beau avoir vendu leur âme au dieux de la danse et de l'exubérance depuis longtemps; certes leur dernier album paru en 2009 avait beau afficher fièrement une santé digne d'un jeune homme en pleine explosion pubère... par quel prodige ont-ils donc retrouvé les traits d'adolescents?
La réponse est évidente : "Happiness" n'est pas le nouvel album des Pepettes. Pourtant, dès les premières mesures de "Silver Lining", le morceau d'ouverture, on est en territoire connu. La boîte à rythmes martiale, le sequenceurs rutilant, la mélodie à deux balles fait effectivement penser aux toutes premières productions de l'illustre duo. "Silver Lining" s'achève d'ailleurs sur des choeurs "à la Go West". On pourrait plier l'affaire ainsi en considérant que la relève est assurée... mais Hurts ne se contente pas d'une seule référence. Sur "Happiness", c'est toute la "synth-pop" des années 80 qui se voit re-liftée par ces garçons coiffeurs de luxe. Plus encore que les Pet Shop Boys (ici surtout singés pour leur esthétique "tire la tronche") c'est Depeche Mode et Human League qui sont véritablement à l'honneur. La voix claire de Theo Hutchcraft doit batailler ferme avec les textures sombres finement ciselées par son comparse, Adam Anderson.
Paradoxalement, "Happiness" n'est pas un disque où le bonheur est roi. Et le pauvre Theo peut brailler tant qu'il veut que la vie est si belle (sur l'excellent single "Wonderful Life") on ne le croit pas une seconde.
Pour ceux qui trouvent que l'electro-pop des années 80 avait besoin d'un énième second souffle, Hurts rempli magnifiquement son cahier des charges. Pour ceux qui pensent que les années 80 n'auraient jamais du exister, ce disque est à honnir sans concession.

samedi 4 septembre 2010

Quadron

Dans la rubrique : "mais d'où est-ce qu'il les sort, ceux là ?"; voici sans conteste la meilleure surprise du moment.
Originaires du Danemark, Coco & Robin, alias Quadron sont bien décidés à faire fondre les icebergs.
Leur premier album est un improbable concentré de soul (façon Supremes) et d'electro minimaliste et vaporeuse. Le tout pimenté par une voix évoquant tour à tour Feist ou un Michael Jackson jeune (excusez du peu).
Malicieux, effronté, suave et sexy; le groove évanescent de Quadron est un ravissement ("Day" est une des plus belles chansons de l'année, évoquant la Corinne Bailey Rae de "Like a Star")
N'ayez pas peur de vous lover dans cet album. Il vous procurera la douceur et l'énergie nécessaire pour survivre dans ce monde de brutes...
Comme dirait John Grant : "vive le Danemark !"

Tendances 2010 version 6.5

De retour de vacances avec plein de souvenirs et autant de chansons...voici la compil qui devrait rendre la rentrée plus agréable...
Dernières livraisons prévues ce week-end.
Allez...on s'y remet...et on oublie pas de voter !

Jamaica vs Puggy : la battle

D'un côté, Jamaica; duo français fraichement rebaptisé suite au succès grandissant de leurs compatriotes Pony Pony Run Run. A l'origine, Jamaica s'appelait Poney Poney. Ils avaient fait leur apparition sur une compilation Tendances, l'an dernier avec un titre intitulé "When Do You wanna Stop Working" qu'on retrouve d'ailleurs sur leur premier (et bien nommé) album : "Short & Entertaining".
Court, ce disque l'est (un peu à court d'idées aussi...). Entertaining ? "I think I like U2" est sans conteste un des singles les plus efficaces et énergisant paru cette année. Il faudrait recommander à certains médecins de le prescrire, en boucle, à leur patient dépressifs. Mais, sur la longueur (si courte soit-elle...vous suivez toujours?) d'un album, le groupe ne parvient pas à transformer l'essai. A vouloir tutoyer Phoenix de trop près, ces jeunes Icare se sont brulé les ailes. C'est peut-être un  peu la faute à leur producteur Xavier de Rosnay. Ce n'est pas parce qu'on casse la baraque avec son groupe (Justice) qu'on peut se targuer de transformer le plomb en or à tous les coups...
On poussera donc un cocorico salvateur à l'écoute du second album de Puggy. Lui aussi très justement intitulé "Something You might Like". Ces petits gars bien de chez nous (euh...ça veux dire quoi, "chez nous" ?) réussissent brillamment là où Antoine Hilaire et Florent Lyonnet se vautrent.
De ce côté ci de la frontière, donc, Puggy livre un disque de power pop varié. Plus organique. La qualité des chansons ainsi que la maîtrise des instruments  est impressionnante.  On ne sera pas surpris de retrouver Mark Plati aux mannettes. Ce producteur émérite (Rita Mitsouko, Gaëtan Roussel et surtout David Bowie) laisse libre cours à sa maestria sur ces chansons bubblegum qui constituent une alternative salvatrice à l'infantile Mika.

Ray Lamontagne & The Pariah Dogs - God Willin' & The Creek Don't Rise

Attention mesdames & messieurs. Ici, on s'arrête. On s'agenouille. On se recueille. Vous êtes face à la plus belle voix de l'americana des années 2000, ni plus ni moins.
Depuis son premier album, paru en 2004, Ray Lamontagne est devenu une valeur sûre du folk contemporain. Tour à tour classique (sur "Trouble"); ténébreux (sur l'intriguant "'til the sun turns black") et plus soul (sur le précédent "Gossip in the Grain"); l'homme des bois s'est retrouvé en studio (dans sa ferme du Massachusetts) avec ses musiciens de tournée (les Pariah Dogs) pour enregistrer son album le plus country. Qu'on se rassure toutefois, ce n'est pas aujourd'hui qu'on enfilera nos santiags pour aller danser le madison à la salle des fêtes du coin avec la voisine d'en face qui a les cheveux gras et qui sent les beignets... La pedale steel est en mode lacrimal. Et la voix du jeune mormon de la Nouvelle Angleterre est un don du ciel qui, dès le très enlevé "Repo Man" vous prend aux tripes pour ne plus vous lacher.
Lamontagne parvient à transformer sur disque sa timidité maladive. Son humilité, à toute épreuve, en fait un songwriter délivré de tout égo, toute grandiloquence inutile. Qu'il s'agisse de son timbre de voix unique ou des arrangements toujours justes de son groupe; tout ici respire l'émotion la plus pure.
L'homme est à l'image de son nom : naturel et grand.

The Magic Numbers vs Angus & Julia Stone : La battle.

Un frère, une soeur : six possibilités.
Deux groupes. Une même Amérique (même si aucun de ces groupe n'est américain). Idéale sur le plan musical. Imaginez les ondes radio peuplées exclusivement de mélodies d'orfèvres et de choeurs angéliques. Des chansons belles à rire et à pleurer (souvent à pleurer, il faut bien le dire)toute la journée... Ce programme vous est offert par les australiens Angus & Julia Stone (un frère et une une soeur, donc) et les anglais de The Magic Numbers (Un frère, une soeur et leurs compagnons respectifs).
Ces derniers nous ont habitués à des pop-songs plutôt enjouées capable de rendre euphorique le fan le plus hardcore de Dead Can Dance en un refrain. On est un peu dérouté dès lors que s'ouvre "The Runaway", leur nouvel album. Lentement, amplement, le premier titre "The Pulse" (qui est aussi, étrangement, le premier single à être extrait de l'album) déploie ses violons tristes. En parcourant la pochette, on découvre que l'album est dédié à l'arrangeur et ami du groupe; décédé durant l'enregistrement de l'album. On comprend dès lors que "The Pulse" fait allusion à ce pouls qui ne battra  jamais plus... On se laisse ainsi gagner par la mélancholie sublimement mise en scène par ces Carpenters d'un autre siècle.
Chez Angus & Julia Stone, ça n'a jamais franchement rigolé. De fait, sur "Down the Way", il pleure toujours à pierre fendre. Ici, le frère et la soeur alternent plus souvent leur chant. D'une simplicité désarmante, leur musique est aussi magnifiquement orchestrée. Ces deux là, touchés par la grâce,  ont su préserver leur part d'enfance et nous l'offrent en partage. On aurait tort de refuser un tel cadeau.

The Coral - Butterfly House

En matière de rock, si l'on juge la maturité d'un groupe à ses solos de guitares opulents; ses refrains gonflés à bloc et l'homogénéité de son style; on tient sans doute ici le fameux album de la maturité du groupe de Liverpool.
Produit par le très respecté John Leckie (à qui l'on doit, entre autre, le mythique premier album des Stone Roses et un tas d'autres joyaux rock) "Butterfly House" est un disque d'un classicisme pur.
La bande à James Skelly, s'applique à livrer des pop-songs dont elle à le secret. On aurait toutefois aimé que ces chansons soient plus franchement "délivrées". L'allégeance aux Beach Boys est, en effet, de plus en plus flagrante.
Contrairement à son prédécesseur (l'excellent "Roots & Echoes" paru en 2007) ce nouvel opus ne contient pas vraiment de titre phare. Les singles éclaireurs ("1000 years" et "Butterfly House") frisent dangereusement (ou délicieusement?) avec l'anachronisme.
Par son honnêteté, ce disque se révèle tout de même émouvant. Il est surtout magnifiquement produit. Les fans des Last Shadow Puppets, devraient sérieusement reconsidérer le cas de The Coral. Sans ces lads de Liverpool, Alex Turner & Miles Kane n'auraient sans doute jamais eu l'audace de s'émanciper...
Après l'implosion de Supergrass; the Coral reste le dernier bastion d'un rock anglais précieux. Pour combien de temps encore...